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Crevez tous, premier massacre,
CD et spectacle, est un
cours de théorie insurrectionnelle électro hip-hop
– si ! c'est possible ! –
sorti à l'automne 2008. |
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Fidèle à sa réputation de changer de forme, de média à chaque nouveau travail, Vaquette, à l'origine, avait imaginé Crevez tous comme un CD de hip-hop d'une quinzaine de titres. Et puis, le premier morceau (la Conjuration de la peur) durant 35 minutes en version disque, deux heures dans son adaptation scénique, le projet a évolué vers un objet en plusieurs opus, au final une dizaine de CD et autant de spectacles (du moins si l’entreprise est menée à son terme – date prévisionnelle le 1er avril 2069…). Après plusieurs reports, le premier massacre de ce Crevez tous peut enfin voir le jour. |
Le CD |
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Disponible sur ce site
en CD (ici) et en téléchargement (là).
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Il est composé de deux titres.
Une "intro" déjà (comme on dit et fait dans le hip-hop) de deux minutes, Crève Vaquette, sous-titrée, pour bien souligner la mise en abyme introspective, Vaquette vs l’IndispensablE, un morceau "hip-électro-punk speed-core" (enfin, un rien atypique tout de même, pape du hardly-listening oblige) en forme de note d’intention, un peu comme une promesse, ou une menace, c’est selon (Crève Vaquette est disponible en MP3 et en intégralité ici sur ce site.)
Mais l’ossature de ce CD est dans le second titre, la Conjuration de la peur, un morceau de 35 minutes qui tente d’analyser comment, en 40 ans, on est passé d’une société où les maîtres mots étaient liberté et imagination, à un temps remarquablement sclérosé et sécuritaire, le nôtre (Des extraits MP3 sont en ligne, là pour être précis.)
Objet formellement bizarre entre hip-hop et slam, oscillant musicalement entre baglama, guitares saturées et musique de film d’horreur, la Conjuration de la peur voit Vaquette dérouler un raisonnement rappé, parfois parlé, entrecoupé de quelques interventions extérieures (extraits d’émissions de radio, de télé, d’interviews, solo de sitar électrique, etc.) et qui commence par un état des lieux de notre pays et de notre époque pour se terminer par de la prospective ("Vivement que ça pète !").
L'IndispensablE tente d’y montrer que la censure subie, par exemple, par Hitler = SS (la merveilleuse, et interdite donc, BD de Vuillemin et Gourio) ou le durcissement des lois pénales en œuvre depuis dix ans en France sont les symptômes d’une même maladie, un choix de société dans lequel la liberté a de moins en moins sa place, et que si cette évolution sécuritaire a commencé par la perversion des idées issues de 68 (perversion due, pour bonne part, aux soixante-huitards eux-mêmes), elle s’est poursuivie par une offensive délibérée des tenants de la pensée réactionnaire, la clef de compréhension de notre époque étant en grande partie dans cette phrase de Nicolas Sarkozy (empruntée avec un rien d’ironie à Gramsci) qui figure en exergue de la chanson : "L'hégémonie idéologique et culturelle précède la victoire politique."
Vaquette tente ainsi de montrer que les principaux maux (plus ou moins fantasmés d’ailleurs) de ces vingt dernières années, le sida, le chômage ou l’insécurité, participent du même principe, celui du contrôle social par la peur (car "la peur rend les gens sages, pas au sens de sagesse, mais d’obéissants"), contrôle social qui, au final, aboutit à ce chantage qui pénètre chaque jour un peu plus notre société : "Si tu ne fais rien, tu ne risques rien", révélant au passage la schizophrénie du discours dominant qui vante sans cesse l’esprit d’initiative et la responsabilité pour mieux les nier en permanence dans les faits.
Manifeste libertaire, cours théorique, pamphlet, la Conjuration de la peur c’est tout cela mais aussi et avant tout un morceau, disons, électro hip-hop slam de 35 minutes à la forme passablement atypique et audacieuse – comme toujours avec Vaquette, du trash-intello pour ceux qui veulent vraiment une étiquette… |
Le spectacle |
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Créé en Suisse le 29/10/2008.
Dernière à Rennes le 17/12/2009.
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Spectacle ou concert ?
Concert de hip-hop puisque Vaquette reprend sur scène la Conjuration de la peur in extenso, mais spectacle bien sûr et avant tout car de 35 minutes en version CD, le morceau (in extenso, certes, mais régulièrement interrompu) passe à deux heures sur les planches.
Alors, certes, l'IndispensablE rappe, mais, et cela n’étonnera guère ceux qui connaissent déjà son travail, il parle aussi, beaucoup, expliquant, développant, précisant, projection Powerpoint à l’appui sous-tendue par un plan structuré en 4 parties (État des lieux, Causes et responsabilités, Un choix de société, Perspectives d’avenir), les thèses qu’il a abordées plus brièvement, ou plutôt moins longuement dans la version CD de la chanson (Je n’y reviens pas, le fond du spectacle étant celui de ladite chanson, il est décrit dans la partie précédente de cette page.)
Et puis, comme ça ne (lui) suffisait pas, Vaquette s’incarne en prêtre de la société de consommation, en appelle à Jacques Brel pour réhabiliter l’imprudence, procède à un rappel exhaustif et détaillé de l’évolution des lois pénales française depuis 2001, réalise, exemple en mains, un bref cours de thermodynamique… et bien sûr exécute deux interludes drolatiques (Pour ceux qui ne connaîtraient pas l’univers du prince du Bon Goût, un interlude drolatique est une chanson à l’humour douteux.)
Poursuivant l’évolution qu’il a entamée avec son précédent spectacle J’veux être Grand et Beau, l'IndispensablE produit une fois encore un objet scénique peut-être un peu moins drôle, plus soucieux, plus en prise avec l’actualité que précédemment, mais toujours aussi inclassable, entre le concert et la conférence (un cours de théorie insurrectionnelle hip-hop ?) dans lequel musique et interventions parlées s’enchaînent dans une forme qui n’appartient qu’à lui, exigeante et engagée – définitivement du trash-intello (pour ceux qui veulent vraiment une étiquette)…
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